La sainte Bible

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Traduction selon la Vulgate dite Bible de Gustave Doré, édition de 1866, libre de droits.

n°18 / Le livre de Job 30 :

Job décrit l’état déplorable où il est tombé.
1Et maintenant je suis le jouet d’enfants dont je n’aurais pas daigné mettre les pères avec les chiens de mon troupeau,
2Dont la force et le travail n’étaient pour rien à mon égard, et qui étaient même regardés comme indignes de la vie.
3Desséchés de faim et de misère, ils allaient chercher ce qu’ils pouvaient ronger dans le désert ; l’affliction et l’indigence avaient défiguré leur visage.
4Ils mangeaient l’herbe et les écorces des arbres, et ils se nourrissaient de racines de genièvre.
5Ils allaient ravir ces tristes aliments au fond des vallées ; et, en ayant trouvé quelques-uns, ils y accouraient avec de grands cris.
6Ils habitaient dans le creux des torrents, dans les cavernes de la terre, ou dans les rochers.
7Ils trouvaient même leur joie dans cet état, et ils faisaient leurs délices d’être sous les ronces et les épines ;
8Ce sont des fils d’insensés, couverts de mépris, et le rebut de la terre.
9Aujourd’hui, je suis devenu le sujet de leurs chansons, je suis l’objet de leurs railleries.
10Ils m’ont en horreur, et ils fuient loin de moi, et ils ne craignent pas de me cracher au visage.
11Car Dieu a ouvert son carquois pour me percer de douleur, et il a mis un frein à ma bouche.
12Aussitôt que j’ai commencé à paraître, mes maux se sont élevés à côté de moi ; ils m’ont renversé et foulé aux pieds, et ils m’ont accablé comme sous leurs flots.
13Ils ont rompu les chemins où je marchais ; ils m’ont dressé des piéges, et ont eu sur moi l’avantage ; et il ne s’est trouvé personne pour me porter secours.
14Ils se sont jetés sur moi, comme par la brèche d’un mur et par une porte ouverte, et ils sont venus m’accabler dans ma misère.
15J’ai été réduit au néant ; vous avez emporté comme un tourbillon ce qui m’était le plus cher, et mon bonheur a passé comme un nuage.
16Maintenant mon âme est languissante, et les jours de l’affliction pèsent sur moi.
17Mes douleurs pendant la nuit transpercent mes os, et les vers qui me dévorent ne dorment point.
18Leur multitude consume mon vêtement ; ils m’environnent et me serrent comme le haut d’une tunique.
19Je suis devenu comme de la boue, je suis semblable à la poussière et à la cendre.
20Je crie vers vous, ô mon Dieu, et vous ne m’écoutez point ; je me présente à vous, et vous ne me regardez pas.
21Vous êtes changé et devenu cruel envers moi, et vous employez la dureté de votre main pour me combattre.
22Vous m’avez élevé, et me tenant comme suspendu en l’air, vous m’avez brisé tout entier.
23Je sais que vous me livrerez à la mort, où est marquée la maison de tous ceux qui vivent.
24Néanmoins vous n’étendez pas votre main pour les consumer entièrement. Car lorsqu’ils sont abattus, vous les sauvez.
25Je pleurais autrefois sur celui qui était affligé, et mon âme était compatissante envers le pauvre.
26J’attendais les biens, et les maux sont venus ; j’espérais la lumière, et les ténèbres m’ont enveloppé.
27Un feu brûle dans mes entrailles sans me donner aucun repos ; les jours de l’affliction m’ont prévenu.
28Je marchais triste ; mais, sans me livrer à l’emportement, je me levais tout à coup, et poussais des cris au milieu de la foule.
29J’ai été le frère des dragons, et le compagnon des autruches.
30Ma peau a noirci sur ma chair, et mes os se sont desséchés par l’ardeur qui me consume.
31Ma harpe s’est changée en de tristes plaintes, et mes instruments de musique en des voix lugubres.