La sainte Bible

De à
Préférences d'affichage Affichage des versets par :

Style d'écriture : Taille du texte :
Couleurs :


Traduction par Louis-Issac Lemaistre de Saci, édition de 1855, libre de droits.

n°18 / Job. 30 :

1MAIS maintenant je suis méprisé par des personnes plus jeunes que moi, dont je n’aurais pas daigné autrefois mettre les pères avec les chiens de mon troupeau,
2dont la force et le travail des mains était moins que rien à mon égard, et qui étaient même regardés comme indignes de la vie ;
3des gens tout secs de faim et de pauvreté, qui allaient chercher ce qu’ils pourraient ronger dans un désert, dont l’affliction et la misère avaient défiguré le visage ;
4qui mangeaient l’herbe et les écorces des arbres, et qui se nourrissaient de racines de genévrier ;
5qui allaient ravir ces choses dans le fond des vallées, et qui en ayant trouve quelqu’une, y accouraient avec de grands cris ;
6qui habitaient dans les creux des torrents, dans les cavernes de la terre, ou dans les rochers ;
7qui trouvaient même leur joie dans cet état, et qui faisaient leurs délices d’être sous les ronces et les épines :
8ces hommes dont les pères sont des insensés, ces hommes de la dernière bassesse, qui sont le mépris et le rebut de la terre, sont ceux qui m’insultent.
9Je suis devenu le sujet de leurs chansons, je suis l’objet de leurs railleries.
10Ils m’ont en horreur, et ils fuient loin de moi ; ils ne craignent pas de me cracher au visage.
11Car Dieu a ouvert son carquois pour me percer de douleur, et il a mis un frein à ma bouche.
12Aussitôt que j’ai commencé à paraître, mes maux se sont élevés à côté de moi ; ils ont renversé mes pieds, et me surprenant ils m’ont accablé comme sous leurs flots.
13Ils ont rompu les chemins par où je marchais ; ils m’ont dressé des pièges, et ils ont eu sur moi l’avantage : et il ne s’est trouvé personne pour me secourir.
14Ils se sont jetés sur moi, comme par la brèche d’une muraille et par une porte ouverte, et ils sont venus m’accabler dans ma misère.
15J’ai été réduit dans le néant : vous avez emporté comme un tourbillon ce qui m’était le plus cher, et ma vie a passé en un moment comme un nuage.
16Mon âme est maintenant toute languissante en moi-même, et je suis tout pénétré des maux qui m’accablent.
17Mes douleurs pendant la nuit transpercent mes os, et les vers qui me dévorent ne dorment point.
18Leur multitude consume mon vêtement ; et ils m’environnent et me serrent comme le haut d’une tunique.
19Je suis devenu comme de la boue, je suis semblable à la poussière et à la cendre.
20Je crie vers vous, Ô mon Dieu ! et vous ne m’écoutez point ; je me présente à vous, et vous ne me regardez pas.
21Vous êtes changé et devenu cruel envers moi, et vous employez la dureté de votre main pour me combattre.
22Vous m’avez élevé, et me tenant comme suspendu en l’air, vous m’avez laissé tomber et brisé entièrement.
23Je sais que vous me livrerez à la mort, où est marquée la maison de tous ceux qui vivent.
24Mais vous n’étendez pas néanmoins votre main pour les consumer entièrement : car lorsqu’ils sont abattus, vous les sauvez.
25Je pleurais autrefois sur celui qui était affligé, et mon âme était compatissante envers le pauvre.
26J’attendais les biens, et les maux sont venus fondre sur moi ; j’espérais la lumière, et les ténèbres m’ont enveloppé.
27Un feu brûle dans mes entrailles sans me donner aucun repos ; les jours de l’affliction m’ont prévenu.
28Je marchais tout triste, mais sans me laisser aller à l’emportement ; je me levais tout d’un coup, et faisais retentir ma voix au milieu du peuple.
29J’ai été le frère des dragons, et le compagnon des autruches.
30Ma peau est devenue toute noire sur ma chair, et mes os se sont desséchés par l’ardeur qui me consume.
31Ma harpe s’est changée en de tristes plaintes, et mes instruments de musique en des voix lugubres.